Lorsqu’on évoque le terme annualisation, le chiffre qui vient en tête, c’est 1607 heures. Vous en avez sans doute déjà entendu parler. Mais pourquoi ce nombre d’heures ? Que cache-t-il vraiment ?
Derrière ce chiffre forfaitaire devenu convention d’annualisation se cache une vraie logique d’appréciation des jours de travail qu’un salarié est censé réaliser sur une période annuelle de 12 mois glissants.
Pour autant, cela mérite qu’on s’y arrête. Suivez le guide.
D'où vient la référence aux 1607 heures annuelles ?
Le chiffre 1607 heures ne doit rien au hasard. Il est prévu par le Code du travail et correspond à la durée annuelle de travail légale pour un salarié à temps plein dans le secteur privé, hors régimes spécifiques ou conventions particulières.
On le retrouve à deux endroits clés :
- Article L3121-41 : il fixe le seuil à partir duquel les heures supplémentaires sont dûment comptabilisées sur une période annuelle.
- Article L3123-1 : il définit le temps partiel comme une durée inférieure à 1607 heures sur l’année (ou la durée conventionnelle si elle est inférieure).
C’est donc à la fois une référence pour le temps plein et un seuil légal pour identifier les dépassements de temps de travail ou les situations de temps partiel.
La formule de calcul des 1607 heures : comment ça marche ?

Vous vous demandez peut-être : pourquoi exactement 1607 heures, et pas 1600 ? Ou 1700 ?
Voici le calcul qui se cache derrière cette fameuse formule :
- On part de 365 jours dans l’année.
- On retire 104 jours de week-end (52 samedis + 52 dimanches).
- On enlève ensuite les 25 jours de congés payés légaux.
- Puis 8 jours fériés tombant en moyenne sur un jour ouvré.
Ce qui nous donne :
- 228 jours travaillés sur l’année.
- Multipliés par 7 heures par jour (base de 35 heures hebdomadaires sur 5 jours).
Soit : 228 × 7 = 1596 heures
Et alors ? On y ajoute la journée de solidarité, soit 7 heures supplémentaires
Résultat : 1596 + 7 = 1603 heures
Mais par souci de simplification et d’harmonisation, le législateur a ajouté +4h pour arrondir à 1607 heures, une valeur devenue la référence annuelle en France.
Annualisation du temps de travail : à quoi sert ce système ?
L’annualisation, c’est avant tout une forme d’aménagement du temps de travail pour répartir le temps de travail tout au long de l’année. Elle devient vite indispensable dans certains secteurs où l’activité fluctue constamment.
Vous voyez ces moments où tout s’accélère, où les équipes courent partout… suivis de périodes beaucoup plus calmes ? C’est le quotidien du tourisme, de l’hôtellerie, de l’enseignement, de la distribution ou encore de nombreuses industries saisonnières.
Avec l’annualisation, on ajuste le rythme. On peut travailler un peu plus quand la charge est forte, un peu moins quand elle retombe. Le tout, c’est que le compte soit bon à la fin de l’année : 1607 heures, ni plus ni moins.
Cette souplesse, bien encadrée, profite à tous. Elle répond aux besoins de l’entreprise sans sacrifier l’équilibre de vie des salariés.
C’est une solution qui donne de l’air aux employeurs. Mais qui doit être mise en place dans le respect des règles, et toujours avec une attention particulière au confort et aux droits des salariés. Il permet aussi d’éviter de payer des heures supplémentaires chaque semaine alors que l’activité est fluctuante. Cela dit, cette flexibilité n’est possible qu’à condition de respecter un cadre légal strict :
- Un accord collectif doit encadrer le dispositif
- Le contrat de travail doit être clair sur la répartition du temps
Un suivi rigoureux des heures est indispensable
1607 heures : attention aux années particulières
L’annualisation est un véritable jeu d’équilibre qu’il n’est pas facile à appréhender.
Prenons un exemple concret : l’année 2026. Cette année présente 8 jours fériés qui tombent sur des jours ouvrés si l’on considère la journée de solidarité comme jour travaillé conformément à la formule 1607h du législateur.
Ces 8 jours fériés qui tombent en jours de semaine sont : Jeudi 1er janvier, Lundi 6 avril, vendredi 1er mai, vendredi 8 mai, jeudi 14 mai, mardi 14 juillet, mercredi 11 novembre, vendredi 25 décembre.
À noter que le lundi 25 mai, c’est le lundi de Pentecôte considéré comme jour de solidarité.
Nous excluons le samedi 15 août, car il tombe sur un jour de repos, idem pour le dimanche 1er novembre.
Pour cette année, nous avons bel et bien 8 jours fériés. Cela est raccord avec la formule des 1607h du Code du travail, d’autant plus que dans notre exemple le jour de solidarité est considéré travaillé comme le prévoit le législateur.
Les plus minutieux, noterons l’écart potentiel introduit par les +4h d’arrondi, même si cela reste marginal.
À travers ce calendrier des jours fériés 2026, l’on constate que l’équilibre de l’annualisation tient à peu de choses.
D’ailleurs, il n’est pas rare que le lundi de Pentecôte, dit jour de solidarité, soit complètement chômé, c’est-à-dire, considéré comme jour férié.
Pour ces raisons, certaines organisations tablent sur 1596 h à travailler par an, par déduction des 4h d’arrondi et 7h de la journée de solidarité.
Si l’on s’en tient aux 1607h telles que définies par le code du travail, si le jour de solidarité est considéré férié dans l’entreprise, cela conduirait à un déficit de -4h et -7h, soit -11h en intégrant l’arrondi.
Dans cette situation, si chaque jour ouvré le salarié travaille 7h, celui-ci ne pourra pas réaliser 1607h, compte tenu des -4h et de la journée de solidarité chômée (-7h). Alors, que se passe-t-il ? Le salarié doit-il des heures à son entreprise, puisqu’il a été payé à hauteur de 1607h sur l’ensemble de l’année ?
Certes, en règle générale, le salarié n’est pas redevable des jours fériés chômés, mais cette question est censée être encadrée en bonne et due forme par votre accord d’annualisation.
La situation du salarié qui ne réalise pas complètement 1607h peut aussi arriver lorsque le planning annuel est mal dimensionné ou simplement parce que l’entreprise n’a pas fourni suffisamment d’activité au salarié.
Par intuition, on peut considérer que les heures déficitaires sont à rattraper, mais encore faut-il distinguer le déficit induit par le décalage des jours fériés qui sont différents de 8 jours. Aussi, le rattrapage des heures déficitaires sur l’année suivante risque de mettre à mal la règle des 1607h censées être le maximum que le salarié devrait réaliser par an.
Nous rappelons ici que le code du travail ne s’applique pas par intuition, il est donc important que tous les cas de figure soient encadrés et anticipés par votre accord d’annualisation.
Plus loin dans l’analyse de l’écart en annualisation

Nous vous proposons de faire un focus sur l’année 2025, qui creuse davantage l’écart car cette année présente 10 jours fériés qui tombent sur les jours ouvrés, alors que le calcul standard part du principe qu’il y en a 8.
Cela crée un écart de 2 jours chômés en plus. Et comme chaque jour compte pour 7 heures, cela représente 14 heures non travaillées qui ne sont pas intégrées dans le calcul de base des 1607h du législateur.
Ajoutez à cela :
- La journée de solidarité potentiellement non travaillée : +7 heures de décalage
- Et les 4 heures d’arrondi entre les 1596 heures calculées et les 1600 prévues initialement
Résultat : un déficit total de 25 heures.
Côté salarié, il est difficile de comprendre les tenants et les aboutissants, car même s’il a respecté son planning hebdomadaire, ces petits écarts calendaires peuvent générer de l’incompréhension, notamment si cela n’est pas clairement précisé dans l’accord d’annualisation.
Comment anticiper le déficit d'heures en annualisation ?
Le cas typique ? Le salarié n’a pas atteint les 1607 heures à la fin de la période d’annualisation. Cela peut se produire pour plusieurs raisons :
- Un trop grand nombre de jours fériés chômés
- Des congés payés et des absences exceptionnelles mal pilotées. Ex. Congés ancienneté ou jours de fractionnement non pris en compte.
- Le salarié qui posent plus de 25 jours de congés payés au cours de sa période d’annualisation
- Des arrêts maladie mal intégrés dans l’estimation de son annualisation
- Etc.
Plusieurs solutions existent pour éviter le déséquilibre :
- Elaborer un planning prévisionnel d’annualisation
- Le planning prévisionnel doit être rempli intégralement sur tous les jours à travailler sur l’ensemble de l’année
- Les congés payés ne doivent pas se superposer aux plages de travail
- Mieux intégrer les absences exceptionnelles et les arrêts maladie généralement considérées comme absences déductibles du quota d’annualisation
- Mieux intégrer les majorations spécifiques, notamment si vous êtes concernés par le travail du dimanche, fériés et nuit travaillés soumis à la majoration des heures
- Mieux intégrer les heures d’astreinte en tant qu’heures exceptionnelles donnant lieu à de la majoration.
Dans tous les cas, le dialogue avec les salariés est indispensable. Et mieux vaut anticiper que subir : un bon outil ou logiciel spécialisé en annualisation peut éviter bien des tracas en fin d’année

Ce qu’il faut retenir
L’annualisation présente des avantages au sens où les heures de travail peuvent être aménagées en fonction de votre pic d’activité. Elle permet de mieux répondre aux fluctuations de l’activité tout en respectant les législations en vigueur.
Cependant, l’annualisation peut avoir quelques inconvénients au sens où elle requiert un pilotage et une validation minutieuse des heures de travail.
Cela peut s’avérer lourd vu le nombre de semaines de travail sur l’année (45,4 semaines en moyenne), multiplié par le nombre de salariés…Mais tout est question de rigueur organisationnelle et de l’adoption d’un bon outil de calcul annualisation.
Voici les points essentiels à retenir :
- 1607 heures = durée annuelle de référence pour un temps plein dans le secteur privé
- Ce chiffre est basé sur un calcul précis des jours fériés sur jours ouvrés (8 en moyenne) et de la journée de solidarité considérée comme jour à travailler
- L’annualisation permet d’adapter le temps de travail aux besoins réels de l’entreprise, sans dépasser les limites légales
- Certaines années peuvent créer des écarts, notamment à cause du calendrier des jours fériés
- Il est essentiel de suivre les heures avec précision et d’intégrer la pose de 25 jours de congés payés
Vous utilisez l’annualisation ou vous envisagez de la mettre en place ? Pensez à vérifier vos outils, votre contrat-type et vos accords collectifs. Parce qu’une bonne gestion du temps de travail, c’est aussi un climat social apaisé.